Le Roi se meurt
d'Eugène Ionesco
Mise en scène de Justine Plaete
Le roi se meurt est une pièce en un acte d’Eugène Ionesco
écrite en 1962. Texte puissant, il confronte l’Homme à l’une
de ses plus grandes angoisses : la mort. Le roi se meurt n’est
pourtant pas une tragédie, c’est un essai d’apprentissage de la
mort, du déni à l’acceptation. C’est l’histoire d’un roi se croyant
immortel, revenant à sa condition d’Homme face à sa mort
imminente et celle de son royaume tout entier. Accompagné de
ses deux reines, de son médecin, de son garde et de sa femme
de ménage/infirmière, il lui reste 1h30, le temps du spectacle,
pour accepter son sort.
Note d'intention
La pièce de Ionesco nous semble porter des thématiques, chères à l’esthétique baroque, que sont la mort, le rêve, la fragilité et la remise en cause des frontières et de la perception du monde et la place instable de l’homme dans l’univers, ici portées par un roi dont la perte de ses sens, de son pouvoir et de son royaume accompagne son agonie. Nous nous sommes nourris de cette esthétique baroque en brouillant les pistes de la temporalité et de l’espace au sein de la pièce.
L’esthétique générale se veut donc à la fois mouvementée, intemporelle, hybride et pour autant cohérente en elle-même ; à l’image de la pièce et de ses innombrables stichomythies où se mêlent des références technologiques et culturelles de tout horizon sans pour autant perdre l’unicité de son propos. Des évocations royales ou de noblesse d’antan qu’on retrouve dans la tapisserie champêtre du fond de scène au futurisme steampunk d’un docteur dont on ne sait s’il est un médecin de la peste ou un macabre personnage de science-fiction, en passant par les références nostalgiques et modernes des années 80-2000 dans le personnage de Juliette, le tout s’installera au milieu d’un ensemble évoquant les années 70, particulièrement kitch et coloré.
Les couleurs pastel, la tapisserie fleurie et les éléments décoratifs et nobles de la scénographie pourront également évoquer l’esthétique frivole du rococo, en vogue au sein de la noblesse française dans la période de pré-révolution ; ici symbole de légèreté et d’insouciance dans un temps où l’effondrement du pouvoir ne fait que menacer. Le but était par ailleurs de créer un monde imaginaire et haut en couleur, à l’image de la lecture que nous avions des personnages de la pièce pour souligner les qualités de fable ou de conte qu’elle propose.
Bien qu’empreinte de douleurs, de désespoir et d’une lutte qui semble vouée à l’échec, nous avons vu dans cette pièce une grande comédie. Ionesco, semble nous proposer une catharsis libératrice qui nous donne quelques clés face à la peur de la mort. Pour nous, la pièce commence par désamorcer nos angoisses en offrant des personnages et situations hautes en couleur au sein d’un théâtre qui transpire la joie, la poésie, le loufoque et la rage de vivre.
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Le roi se meurt nous autorise à susciter le rire, à nous réunir de manière presque commémorative autour du sujet parfois tabou qu’est la mort, à l’égard de laquelle nous partageons pourtant tous.te.s une idée plus ou moins terrifiante et qui nous isole des autres. Elle nous permet, en riant du roi ou en pleurant pour lui, de rire de nous-même et de nous pardonner nos propres angoisses.
Une esthétique colorée et pleine de vie, de messes basses comiques, d’éclats burlesques, d’échecs clownesques et de virtuosités labiales et corporelles nous paraissaient donc indispensable au sein du spectacle. Au sein de la langue de Ionesco, taxée de l’expression parfois galvaudée « d’absurde », nous avons trouvé une curiosité plus sensible et délectable qu’irrationnelle.
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Les personnages n’en finissent pas de parler, d’ordonner, d’annoncer, de se répéter, de prier, de lister et de perdre le fil de leur parole, comme si, pour toute dernière dignité, tout dernier plaisir et tout dernier ridicule face à la mort, la parole pourrait toujours rester leur arme, parfois cinglante, impérieuse ou implorante, avec sa puissance, ses échecs et ses transformations infinies et truculentes.
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Le texte nous permet de passer du calme aux éclats, de la mitraille de mots aux lentes palabres qui feront place au silence, de l’éloquence comique à la simplicité d’un discours trop grand pour être déclamé.
Les ruptures y sont donc reines dans un tourbillon de registres et d’états qui auront pour vocation d’alterner le coupage de souffle et les détentes bienvenues et respirables pour le public. La musique, mêlant elle aussi les références temporelles, y jouera également un rôle clé en accompagnant avec énergie, joie, mélancolie ou puissance dramatique plusieurs danses, monologues ou chœurs de personnages ; pour enfin accompagner le spectacle sur un dénouement apaisant, après qu’il fut si longtemps redouté par ses personnages, et peut-être même, par nous tous·te·s.
L'Equipe
Mise en scène – Justine Plaete, assistée de Tom Da Sylva
Jeu – Jacques Girard, Emma Chéron, Pauline Duranton,
Salomé Beaumont, Louison Yvin et Tom Da Sylva
Costumes – Aglaé Plaete
Création Lumière – Sylvain Colon
Justine Plaete
Metteuse en scène
Emma Chéron
La reine Marie, deuxième
épouse du roi Bérenger
Jacques Girard
Le roi Bérenger 1 er
Pauline Duranton
La reine Marguerite, première
épouse du roi Bérenger
Louison Yvin
Le médecin qui est aussi
chirurgien, bourreau,
bactériologue et astrologue
Salomé Beaumont
Juliette, femme de ménage,
infirmière
Tom da Sylva
Le Garde